mardi 17 septembre 2019

Chapitre 5

#ontheroadagain

Un nouveau chapitre à découvrir sur le blog " à la conquête de Ronaldo" tome 2

Le premier opus est disponible au format numérique : ICI  
Bonne lecture !



5.



À 18 heures tapantes, chaque jour, R. appelait en mode vidéo pour récolter des informations relatives à ma grossesse.

Les premiers temps, j’attendais avec impatience ces précieux moments où nous n’étions rien que nous deux. L'attente me semblait insurmontable jusqu'à la sonnerie ; celle-ci emplissait mon cœur qui galopait au-delà de la vitesse autorisée. Mon corps imprégné d’une légère moiteur suintait une vague de fébrilité fiévreuse.

Durant ces appels, l’émotion me submergeait et se traduisait par un visage marqué par de petites plaques rouges éparses et disgracieuses m’empêchant de m’exprimer. Le désir naviguait sous une houle d’impatience à la merci d’un corps assoiffé…de quelque chose d'indéfinissable. Je me souviens avoir été suspendue à ses lèvres comme une midinette, faisant des yeux d’antilope en espérant l’entendre prononcer ces quelques mots :« J’arrive, je prends mon jet privé, et dans quelques heures, je suis là auprès de toi…». 

Je perdais toute notion de la réalité ; je voulais tellement le voir en chair et en os, le serrer contre moi, imaginant nos corps entrelacés encore une fois, mais cette fois d’une passion commune et sans limite. 
Lui n’a jamais oublié le contrat qui nous unissait. Ses appels ont toujours été ciblés, son comportement distant et froid
Un soir, je pris l’audace à bras le corps pour réaliser mon souhait le plus cher : qu'il accepte de venir me voir. Cette audace se renouvela, j'ai insisté, mais aucun de mes propos sembla l’ébranler. 
Rien absolument rien n’y fit, peut-être avais-je manqué de conviction, lui me rappelait avec fermeté les lignes d'un contrat qui entre parenthèses me permettait de vivre confortablement dans sa luxueuse villa - ce n’était pas le sort de toutes les mères porteuses, me lançait-il avec une certaine arrogance. 

Grâce à lui, je vivais dans un environnement impensable pour une travailleuse qui, partant aux aurores, gagnait un salaire très dérisoire (par rapport au sien), seuls les magazines people pouvaient me permettre l'accès, en quelques clichés, à son monde
Dorénavant, grâce à lui, je sortais de ma routine ; je ressortirais grandie de cette expérience incroyable que je pourrais sans doute conter peut-être même fièrement au coin du feu plus tard, à mes petits-enfants

Bref, il était l’autorité, j’étais esclave de sa décision. J’ai rapidement compris que la future naissance était tout ce qui l’intéressait. Il était cohérent avec le contrat, moi pas. 

À quel moment ai-je cessé d’y croire ; à quel moment ai-je cessé d'attendre ? 

Lorsque le silence de la fin des appels survenait en me laissant seule désarmée, avec comme compagnie une tristesse infinie, lorsque la blancheur des murs paraissait aussi éclatante que son absence durable. 
Son impatience perceptible de me voir accoucher motivait ses appels...
Lorsque mes espoirs de le voir en chair et en os, sont devenus de plus en plus ténus, et même si pendant un temps, la perspective de l’échec me déprima, heureusement l'envie de me battre se révéla plus forte. 
Je n’ai jamais pu me faire à l’idée d’être seulement mère porteuse, pour un tas de raisons que vous devinez. Je voulais bêtement continuer à croire au coup de foudre qui m’avait frappé, et qu'un horizon était possible, moi, lui, le bébé. 
Il était évident que je voulais ajouter à ma rencontre un sens, une évidence...mais j'ai dû me contenter de son appel une fois par jour...
Mon enthousiasme, peu à peu, a cédé la place à une forme de désolation, puis une déception, par chance, la rage s’en est mêlée…

Heureusement, tout s'est arrangé, et maintenant au moment où j'écris ces lignes, je suis pleinement libérée de ces attentes pathétiques et insensées qui m'ont fait perdre du temps...

Le combat a su se frayer un chemin pour construire à force de volontés, ma propre histoire, une histoire qui ne me laisserait pas seule à ruminer mon désespoir…

Mon professeur me parlait souvent de ses auteurs préférés, en me citant quelques phrases, une phrase de Camus a su m’éclairer sur le devenir de mon sort, ces mots me firent l'effet d'un choc : "Plutôt mourir debout que de vivre à genoux." Une bataille à mener.

Miraculeusement, je réussis à me donner la force d’écourter les appels qui me volaient mon temps, ce temps si précieux qui me sortirait de mon propre tourment !

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