Chapitre 15 "Exige beaucoup de toi-même ainsi beaucoup d'ennuis te seront épargnés"

J-20

  Un air printanier se répand dans l'hiver. Je m'autorise une sortie après avoir accompli mes envois de candidatures et d’appels téléphoniques…

Cet après-midi, une entreprise appelle. L'employée commence par s’excuser de ne pas avoir appelé au moment où ma candidature lui est parvenue par le biais d’une agence d'intérim, il y a trois semaines…

Bien sûr je ne me souviens plus de l'offre. La cadence imposée par l'urgence ne me permet plus de faire de la qualité.

Les envois sont quotidiens, nombreux, la possibilité de se mélanger les pinceaux forcément inévitable. Lorsque l'employeur me parle du poste, je fouille dans ma mémoire à la recherche de bribes d'informations.

Heureusement la femme mentionne le secteur d’activité. Automatiquement je me souviens avoir relancé l'agence d'intérim hier matin, mes souvenirs resurgissent.

L'employeur se manifestant plusieurs semaines plus tard me paraît suspect.

J'imagine le salarié harcelé claquer la porte de l'entreprise. Le petit salaire est sûrement l'une de raisons, et si le travail est accompagné par le stress et la pression alors la place est presque toujours vacante…

Je me souviens surtout du manque d'intérêt éprouvé à l'annonce de la proposition de poste par l'agence. L’entreprise est loin de mon habitation, mes compétences ne sont pas celles recherchées par l'entreprise, le tout accompagné d’un salaire de misère...

Bref rien de compatible, et qui puisse motivé ma prise de parole.

Je m'interroge aussi sur la motivation de l'entreprise à s'intéresser à ma candidature. Cependant je dois accepter de dérouler les lignes de mon CV.

Je réponds volontiers aux questions peu originales sur mon Avenir, où je me vois dans cinq, dix et vingt ans...euh toujours envie de me foutre de leur gueule quand j'entends cette question sur l'avenir...

Et toi tu te vois où dans vingt ans? De quelle maladie de stressé, ton futur sera-t-il accompagné? Malgré une certaine ironie, je récite mes phrases docilement. Mon texte les yeux fermés.

Puis elle parle de l'entreprise et du poste. À ce moment là je ferme les yeux, sans aucun risque qu'elle me surprenne en train de m'échapper par la pensée.

Soudain le réveil, comme si elle avait deviné que je n'étais plus vraiment attentive, elle me redonne la main avec une question tordue: «est-ce que le poste vous intéresse?».

Je m'entends dire «oui oui bien sûr». Un oui oui pas très motivé sans vraiment de conviction, mais je repense à la fin de mes droits qui me menacent d'extinction...

Aussitôt la femme propose de nous rencontrer dans les bureaux de l'entreprise la semaine suivante.

J'accepte le rendez-vous malgré l’heure fixée à 17 heures.

Elle finalise l'entrevue téléphonique en promettant d'envoyer un mail de confirmation avec la date, l'heure et surtout l'adresse du rendez-vous ainsi que le nom du dirigeant à rencontrer.

Je dis «Merci au revoir». Je suis mécontente de devoir recommencer le même cirque la semaine suivante. Je ne serai certainement pas rentrée avant 20 heures.

...

Cette fois, je n’ai aucune mauvaise pensée, j'ai même envie de la remercier de ne pas avoir envoyé le courriel de confirmation. Elle a ainsi évité mon déplacement.

Du temps a passé, une semaine. Je reviens à la page du jour de l'appel pour expliquer ce qui s'est passé le jour du rendez-vous, l'agence d'intérim appelle à 17 heures 05 en me reprochant précisément de ne pas être dans l'entreprise. Je leur avoue n’avoir jamais reçu le message de confirmation de leur client. Par conséquent il m'est impossible de me déplacer sans en connaître l'adresse.

L'agence me reproche mon manque d'élan, j'aurai dû les appeler, aller chercher l'information moi-même. Face au peu d'intérêt que l'entreprise me témoigne, je me serai certainement déplacée pour rien...

Face à cette situation rocambolesque, je me suis demandé si tout n'était pas qu'une mise en scène. Certaines entreprises font perdre sciemment le temps des Emplologues. Les employeurs ne se gênent pas non plus pour mettre une pression psychologique en remettant la faute au candidat.

«Être sur ses gardes constamment» pour éviter de tomber dans le piège d'employeurs malveillants qui n'ont aucun scrupule.

Je vois clair dans leur jeu sadique.

Il y a la perte de temps que tout cela occasionne mais aussi la perte d'argent. L'Emplologue paye son déplacement, sans être remboursé!

Depuis le temps, si je devais faire les comptes de tous ces déplacements, j'aurai pu m'offrir un beau séjour sur une île paradisiaque.